Après les revalorisations du 1er octobre 2021 et du 1er janvier 2022, le salaire minimum va de nouveau progresser sous le coup de l’inflation. Le 1er mai 2022, le SMIC augmentera de 2,6% soit un SMIC mensuel de 1 645,58 € brut par mois. Cela concernera entre 2 et 2,2 millions de salariés en France.

Ce n’est pas un coup de pouce du gouvernement, mais bien une hausse automatique due à un rebond de l’inflation. 

Comme une conséquence inéluctable de la forte inflation enregistrée ces derniers mois, le Smic va une nouvelle fois augmenter mécaniquement le 1er mai. Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine et la hausse significative des prix de l’alimentation et de l’énergie, la mesure était attendue. L’Insee, en publiant le 15 avril son estimation définitive de la hausse des prix à la consommation en mars, en a révélé le montant exact.

Actuellement fixé à 1 269 euros nets par mois pour 35 heures de travail hebdomadaires, le Smic concerne, selon la Dares, 2,04 millions de Français (soit 12 % de l’ensemble des salariés du privé). Cette revalorisation automatique le fait passer à 1 303 euros nets mensuels, ce qui représente une hausse de 34 euros par mois. Redéfinies en 2013, les règles de revalorisation du Smic, hors « coup de pouce », s’appliquent généralement par décret au 1er janvier sous le coup de l’inflation. En cours d’année, une autre revalorisation automatique peut être déclenchée dès lors que l’indice des prix à la consommation augmente d’au moins 2% par rapport à sa valeur lors de la précédente revalorisation. C’est ce qui s’est passé en octobre 2021, et ce qui vient de se reproduire.

Avec quelles répercussions sur les branches et les négociations salariales ?

La conséquence est elle aussi automatique : un nombre massif de branches vont se retrouver de facto en situation de non-conformité de leurs premiers niveaux de grille, qui basculeront sous le niveau du SMIC.

Ce sera le cas le 1er mai pour 76 branches des 171 branches de plus de 5000 salariés du secteur général. Si on y ajoute celles qui étaient déjà sous le SMIC, ce sont environ 144 branches qui seront en situation de non-conformité à cette date.

Cette quatrième hausse enregistrée en moins de dix-huit mois n’a rien d’anodin pour les salariés comme pour les branches. Déjà, au 1er janvier dernier, les deux revalorisations successives avaient fait basculer 130 branches dans une situation de non-conformité – en l’occurrence avec au moins un échelon inférieur au Smic. Sous l’effet des négociations salariales (et des minima conventionnels) et de la pugnacité des organisations syndicales, ce décrochage s’était depuis réduit : il y avait 68 branches en non-conformité au 8 avril et 54 accords de branches conclus. Mais dans la majorité de ces accords, le premier niveau de grille négocié ne passe pas le cap des 20 euros au-dessus du Smic…

Dans de nombreuses branches, comme la sécurité, la coiffure ou la volaille, les accords signés ces derniers mois en vue de remettre les grilles en conformité sont déjà caducs ou le seront bientôt. On n’a jamais vu ça auparavant ! Et puisque le reste des salaires n’augmente pas automatiquement, davantage de gens risquent de se retrouver au niveau du Smic. « C’est là tout le problème de l’écrasement des grilles. »

Une sorte de retour à la case départ

Renégocier à la hâte. Encore. Car le contexte d’inflation impose de nouvelles négociations afin de maintenir le pouvoir d’achat. Pour certaines branches qui sortent tout juste de plusieurs mois de discussions (voire de véritables bras de fer), la réponse est claire : ça attendra les NAO de 2023. Côté CFDT, c’est un sentiment teinté d’usure autant que de combativité qui l’emporte. « On est de retour à la case départ », lâche un négociateur de branche quelque peu amer, qui souhaiterait que « ces négociations nous offrent enfin l’occasion d’avoir une vision plus large, et des perspectives »… « On restera dans une course à l’échalote tant que l’on n’assumera pas de regarder globalement les rémunérations qui donnent un sens aux politiques salariales. »

Pour y parvenir, plusieurs leviers d’action ont été utilisés au cours des derniers mois. Vis-à-vis de l’État, tout d’abord, avec la volonté appuyée de la CFDT d’imposer une conditionnalité des aides. Les branches affichant des minima en dessous du Smic seraient alors obligées d’ouvrir des négociations dans un délai de trois mois pour continuer à bénéficier des exonérations de charges sociales sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic. Les entreprises vertueuses pourraient à l’inverse ne pas être pénalisées à cause de la non-conformité de la branche à laquelle elles sont rattachées. « Le gouvernement s’est jusque-là contenté d’une incitation forte mais, face à ce nouveau basculement, trouver une solution plus directive devient urgent », estime la CFDT.

Pour la CFDT, cette situation n’est plus tolérable. Il est urgent que les branches et les employeurs mettent en place de réelles politiques salariales. La CFDT observe que les augmentations des minima conventionnels se traduisent trop souvent par une simple mise en conformité des grilles de salaires sans aucune réflexion sur les déroulements de carrière. C’est ce qui s’est passé après les hausses récentes du SMIC des 1er octobre et 1er janvier derniers. La CFDT déplore également depuis plusieurs années un effet de compression de l’échelle des salaires qui conduit à ce que, dans certaines branches, seules quelques dizaines d’euros séparent les plus bas niveaux des plus hauts, privant un nombre considérable de travailleurs de toute perspective d’évolution. 

Augmentation du SMIC : La CFDT demande - CFDT INTERCO 91

La CFDT le dit désormais clairement :

La gestion des minima de branche à la petite semaine,

ça suffit ! 

Elle exige que les employeurs redonnent du sens aux systèmes salariaux dans les branches et dans les entreprises et proposent une juste rétribution du travail ainsi qu’un meilleur partage de la valeur. Les employeurs doivent s’engager pleinement dans des négociations salariales qui amènent à de réelles augmentations de salaires pour redonner du pouvoir d’achat aux travailleurs.