Les travailleurs européens devraient pouvoir bénéficier d’un congé d’aidant de cinq jours instauré par une directive.
La directive européenne du 20 juin 2019 concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants instaure un congé d’aidant de cinq jours par an et par personne pour tous les travailleurs européens qui s’occupent d’un proche handicapé ou malade.
Bien que les États membres soient libres de décider s’ils prévoient une rémunération ou une allocation pour le congé d’aidant, l’article premier de la directive les y encourage « afin de garantir le recours effectif à ce droit par les aidants ».
Le texte reconnaît par ailleurs à chaque travailleur le droit de s’absenter de son travail « pour raisons de force majeure liée à des raisons familiales urgentes en cas de maladie ou d’accident qui rendent sa présence immédiate indispensable ». Enfin, les aidants peuvent demander des formules souples de travail (travailler à distance, avec des horaires souples, réduction du temps de travail, etc.) pour s’occuper de membres de leur famille.
La directive impose aux employeurs d’examiner chaque demande et d’y répondre dans un « délai raisonnable, en tenant compte à la fois de [ses] besoins et de ceux des travailleurs ». Tous refus ou report doit être justifié. Le travailleur a le droit de revenir au régime de travail de départ à la fin de la période convenue avec l’employeur ou avant, lorsqu’un changement de circonstances le justifie. La directive précise que les États membres peuvent subordonner le droit de demander des formules souples de travail à des périodes de travail ou à une exigence d’ancienneté, qui ne doivent pas dépasser six mois. Ces dispositions s’appliquent aussi aux travailleurs en contrat à durée déterminée.
Être aidant doit rester un choix
La CFDT porte depuis longtemps des revendications pour améliorer le quotidien des aidants comme celui des professionnels qui interviennent dans ce secteur.
Les deux approches sont intrinsèquement liées. Les proches aidants doivent pouvoir compter sur des services accessibles financièrement afin de ne pas se retrouver enfermés dans leur rôle, pouvoir souffler lorsqu’ils en ressentent le besoin, pouvoir poursuivre leur activité professionnelle. Développer une offre adaptée et financée par la solidarité nationale est donc essentiel.
Les études montrent l’importance pour les proches aidants de garder un lien avec leur travail, véritable « bulle d’oxygène » pour beaucoup de salariés. Pourtant, l’articulation entre la vie professionnelle et la vie d’aidant reste difficile. Parmi les aidants, 25 % ont déjà pris des congés payés ou des disponibilités pour pouvoir s’occuper d’un proche, 65 % ont changé leurs horaires de travail et 36 % ont réduit leur temps de travail.
Autant d’aménagements qui, la plupart du temps, ne sont pas négociés dans un cadre collectif, et qui peuvent avoir des conséquences sur la carrière professionnelle, la rémunération ou encore la pension de retraite. Et comme une majorité d’aidants sont des aidantes, cette situation amplifie encore les inégalités entre femmes et hommes dans les entreprises. Progressivement, la difficulté de mener de front sa carrière tout en venant en aide à des proches peut conduire à une forme de désinsertion professionnelle.
Selon la CFDT, il est donc urgent de mener une réflexion sur cette problématique qui touche massivement les salariés, mais qui reste encore peu prise en compte dans les entreprises et les administrations. Or, avec le vieillissement de la population, la nécessité de créer un cadre collectif et des outils adaptés pour les salariés va se faire de plus en plus sentir. La création d’un compte épargne-temps universel, une mesure que soutient la CFDT, pourrait par exemple être une des pistes de réflexion pertinentes pour apporter un peu de souplesse aux travailleurs. Encore faut-il qu’il concerne l’ensemble des salariés, quelle que soit la taille de l’entreprise.
Un enjeu d’égalité professionnelle
Les femmes représentent 57 % des salariés aidants. Ce taux monte à 64 % pour les aidants d’un proche en forte situation de dépendance. « Plus touchées par la situation d’aidance, les femmes doivent donc davantage concilier ce rôle avec leur vie professionnelle. Cela a pour conséquence de freiner l’évolution de leur carrière ou de les contraindre à s’arrêter de travailler, et parfois même de glisser rapidement dans la précarité », peut-on lire sur la Plateforme RSE de France Stratégie dans un rapport de 2022. En outre, les aidants (et donc les aidantes) sont davantage exposés aux discriminations en entreprise, comme la perte de responsabilités ou d’avantages acquis, les réaménagements non sollicités dans les responsabilités, le refus de promotion ou d’augmentation de rémunération, la rétrogradation, l’aménagement d’horaires ou encore des mutations non demandés…
Selon le Baromètre des aidants réalisé par BVA en 2019, 17 % des aidants en activité craignent ainsi d’être bloqués dans leur évolution professionnelle et 13 % ont déjà connu une forme de stigmatisation en raison de leur situation ; 41 % se sentent par ailleurs moins efficaces dans leur travail en raison du stress et de la fatigue. En outre, 16 % ressentent un affaiblissement des liens avec leurs collègues du fait de leurs absences. Rappelons que le code du travail retient parmi les discriminations prohibées par la loi celles qui ont trait à la situation de famille des salariés.