L’employeur est tenu par la loi au titre des principes généraux de prévention de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la sante physique et mentale de ses salaries. Ainsi, en matière de harcèlement , moral et sexuel, il doit prévenir les agissements fautifs, les faire cesser et sanctionner l’auteur des faits.
Le harcèlement sexuel :
Le harcèlement sexuel a été redéfini en 2012 dans le Code pénal et dans le Code du travail suite à l’abrogation de l’incrimination dans le Code pénal par le Conseil constitutionnel au motif d’une imprécision dans sa définition. En dernier lieu les dispositions sur le harcèlement sexuel ont été complétées par loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.
Le Code du travail précise qu’aucun salarié ne doit subir les faits de harcèlement sexuel « constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante » ; mais aussi les faits assimilés au harcèlement sexuel « consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers » .
Le Code pénal reprend cette distinction, en définissant plus précisément les actes répréhensibles d’une part ce que la doctrine qualifie de « harcèlement environnemental » à savoir la création d’un climat sexiste qui nécessite répétition d’agissements prohibés (au moins 2), et le « chantage sexuel » qui n’a pas besoin d’être répété.
La mise en place de référents contre les violences sexistes et sexuelles dans les entreprises :
Par l’employeur. Dans les entreprises d’au moins 250 salariés, l’employeur doit désigner un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. Ce référent est chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes (L1153-5-1 C.trav.)
Par le CSE. Depuis le 1er janvier 2019, chaque CSE, quel que soit le nombre de salariés dans l’entreprise, doit désigner en son sein un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes (L. 2314-1 C.trav.). Le référent doit être associé et, si besoin, contribuer à la mise en place d’actions de prévention dans l’entreprise ainsi qu’au suivi de la prise en charge des victimes. Il peut bénéficier d’une formation prise en charge par l’employeur.
Le harcèlement moral :
Le Code du travail comme le Code pénal proscrit le harcèlement moral (art. 222-33-2 C.pénal et L.1152-1 C.trav.)
Le harcèlement moral est le fait de commettre des « agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
Le harcèlement moral n’est pas nécessairement du fait de l’employeur ou d’un supérieur hiérarchique de la victime, et peut avoir lieu sur une courte période.
Dispositions communes à toute forme de harcèlement :
Quant à la prévention :
L’employeur doit prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement sexuel ou moral ; il doit informer par tout moyen, tous les salariés de l’entreprise, y compris les personnes en formation ou en stage, voire les candidats à un recrutement ou à une formation (art. L1152-2 C.trav), des dispositions pénales relatives aux deux formes de harcèlement (mesures de diffusion sensibilisation sur la législation en vigueur, actions de formation visant à l’amélioration des connaissances et identification de ces faits).
Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le règlement intérieur doit rappeler les dispositions relatives au harcèlement sexuel et moral.
Le CSE peut proposer des actions de prévention en la matière.
Le harceleur n’a pas obligatoirement de rapport hiérarchique ou d’autorité avec sa victime, homme ou femme. Cependant, l’abus d’autorité, tout comme le fait de s’en prendre à une personne particulièrement vulnérable constituent des circonstances aggravantes.
L’employeur doit par ailleurs, répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés.
Protection des victimes ou des témoins :
La loi organise la protection des victimes et des témoins de harcèlement en prohibant toute mesure discriminatoire prise à leur encontre. Ainsi :
– Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné ou subir une quelconque mesure discriminatoire, directe ou indirecte pour avoir subi ou avoir été témoin de faits constitutifs d’un harcèlement, moral ou sexuel.
– Toute rupture du contrat de travail ou tout acte contraire aux règles précédentes sont nuls de plein droit.
Quant aux intervenants :
Si vous estimez être victime de harcèlement sexuel ou moral au sein de votre entreprise, vous pouvez demander l’intervention de vos représentant du personnel au CSE qui, en vertu de leur droit d’alerte, saisissent l’employeur. Ce dernier doit dans ce cas procéder sans délai à une enquête et prendre des dispositions pour mettre un terme à cette situation. Vous pouvez également vous adresser à l’inspecteur du travail (les fais peuvent être constatés sur procès-verbal par les inspecteurs et contrôleurs du travail).
Vous pouvez également vous rapprocher de votre médecin du travail.
En cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte et à défaut de solution, le salarié ou le représentant élu, si le salarié averti par écrit qu’il ne s’y oppose pas, peut saisir le bureau de jugement du conseil des prud’hommes qui statue selon la forme des référés (art. L.2312-59 C.trav).
Si vous décidez de porter l’affaire devant les tribunaux, les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise peuvent quant à elles agir en justice, en lieu et place (mais avec l’accord écrit) du salarié victime de harcèlement sexuel ou moral y compris se porter partie civile devant le juge pénal (art. L.1154-2 C.trav.).
Par ailleurs, depuis le mois d’août 2012, les associations qui ont pour objet de lutter « contre le harcèlement sexuel » sont habilitées, avec l’accord de la victime, à « exercer les droits reconnus à la partie civile ».
Quant à la charge de la preuve :
Devant un conseil de prud’hommes, le salarié victime doit « établir les faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement » sexuel ou moral. C’est ensuite à l’employeur qu’il appartient « de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un harcèlement » et de justifier sa mesure par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme ensuite sa conviction après avoir ordonné, si nécessaire, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles). Il en est de même si la victime est un candidat à un emploi à un stage ou à une formation en entreprise (art. L.1154-1 C.trav)
Quant aux sanctions :
Toute personne qui se rend coupable de harcèlement sexuel ou moral est passible d’une sanction pénale (pouvant aller jusqu’à 2 ans de prison et 30 000 € d’amende, voire 3 ans de prison et 45 000 € d’amende en cas de circonstances aggravantes).
Par ailleurs, si les faits de harcèlement ont été commis par un salarié, ce dernier est en plus passible d’une sanction disciplinaire par l’employeur. Selon la Cour de cassation, il peut y avoir harcèlement même hors du temps et du lieu de travail (Cass. Soc. 19/10/2011).
Bon à savoir : Il ne faut pas confondre harcèlement moral et discrimination syndicale. Si la frontière entre les deux est parfois difficile à établir, il est conseillé d’aller sur le terrain de la discrimination syndicale : la procédure est moins complexe et les chances d’obtenir gain de cause plus nombreuses.